Bio : quelles stratégies de rebond ? Interview de Christophe SOVRAN, Sustin Food (Hoope)

A l'occasion d'une édition spéciale Natexpo de Passerelle (La Lettre de la relation PME/ETI - Enseigne publiée par la FEEF), Chistophe Sovran, Co-fondateur de Sustin Food, répond à nos questions.

Quelles stratégies de rebond mettez-vous en place ?

Christophe Sovran : Depuis la création de HOOPE et après avoir fait un marché test, nous avons privilégié la grande distribution comme principal canal de distribution de nos produits. En effet, HOOPE est une marque de produits sains et 100% naturels, en utilisant la richesse nutritionnelle de la spiruline dans des produits gourmands du quotidien. Pour être au plus près des nouvelles attentes des consommateurs, tous nos produits sont BIO, sans huile de palme, sans additifs, 100% végétal, en majorité Nutriscore A et made in France. Nous nous positionnons en tant qu’expert nutritionnel naturel grâce à la spiruline.

Le BIO subit actuellement une baisse en volume et en valeur, c’est une réalité. Cependant, cette baisse est à nuancer : là où les enseignes spécialisées BIO sont à la peine, la grande distribution s’en sort mieux, en particulier le segment épicerie sucrée BIO
(-3% seulement vs N-1).

Dans ce contexte difficile, les acteurs du BIO doivent se réinventer pour gagner à nouveau des parts de marché et retrouver la croissance des années précédant le COVID, et cela passera par plusieurs leviers :

-La différenciation produit : faire du BIO pour faire du BIO ne suffit plus. Le consommateur n’est pas dupe, il faut aller plus loin dans la démarche produit : proposer des produits vraiment différenciants qui apportent de la valeur ajoutée et répondent aux nouvelles attentes des consommateurs.

-Le prix : En cette période inflationniste, les écarts de prix entre un produit BIO et le même produit conventionnel sautent aux yeux des consommateurs. Encore une fois, il faut aller plus loin dans la proposition de valeur pour justifier cet écart de prix.

- La communication globale du BIO : les consommateurs sont perdus et confondent tous les messages marketing entre le BIO, le sain, le local, la naturalité, etc. Certains labels rajoutent également une complexité supplémentaire aux messages.

Pour faire face à la crise, HOOPE a mis en place plusieurs actions :

La sortie de nouveaux produits toujours différenciants et à forte valeur ajoutée aussi bien pour les consommateurs que pour l’assortiment des distributeurs, qui vont plus loin que le simple label BIO.

Nous avons passé une hausse tarifaire bien en dessous des taux de hausse entendus dans la presse, afin de ne pas trop impacter les prix de vente en magasins.

Notre message est clair : nos produits sont sains et naturels, en utilisant la richesse nutritionnelle de la spiruline. 

Comment voyez-vous l’avenir de la bio ?

CS : Lorsque l’on regarde le marché du BIO, il a été en hyper-croissance au cours de ces 10 dernières années en triplant son chiffre d’affaires sur la période. Nous atteignons actuellement un palier qui est principalement dû au contexte global de multi-crise (crise économique, financière, politique, sociale, …) selon moi : tout cela influe sur la consommation et les choix qui sont réalisés par les consommateurs lors de leur acte d’achat.

Cela signifie-t-il que, d’un coup, les consommateurs ne sont plus en recherche de produits BIO ?

CS : Je ne le pense pas. Je pense au contraire que cela va s’accentuer encore dans les années à venir !

Cependant, momentanément, la crise a pris le dessus.

C’est dans ces moments-là que le BIO ne suffit plus pour convaincre le consommateur, il faut aller plus loin dans la démarche.

Chez HOOPE, nos volumes n’ont pas baissé, contrairement au marché global du BIO. En se différenciant, en apportant de la valeur ajoutée au consommateur, en répondant à un vrai besoin de consommer plus sain et plus naturel, en allant au-delà du simple fait que le produit soit BIO ou non BIO, le consommateur ne va pas faire d’arbitrage.

Quelles seraient vos préconisations d’implantation du bio en magasin GD ?

CS : Aujourd’hui, du fait de l’organisation des enseignes et des magasins, HOOPE est majoritairement présent dans l’univers spécifique BIO. Cependant, il arrive que nos produits soient également positionnés dans la zone BIO de chaque rayon dans le conventionnel, selon les enseignes et la politique de chaque magasin. Nous pouvons donc facilement comparer. Dans notre cas, les ventes sont à peu près similaires dans l’univers BIO ou lorsque nous sommes placés dans le conventionnel.

Mais, de manière globale, nous trouvons qu’un positionnement des produits BIO dans chacun des rayons du conventionnel est plus cohérent, en balisant les produits BIO au début de chaque rayon. Cela permet de les rendre visible et de maximiser les ventes de ces produits BIO, souvent à forte valeur ajoutée pour le distributeur également. En effet, les consommateurs réfléchissent par unité de besoin lorsqu’ils font leurs courses, c’est la clé d’entrée lorsqu’ils font leur liste de course. Le fait de choisir un produit BIO vs un produit conventionnel vient ensuite dans la réflexion. Il est donc selon nous plus cohérent à l’avenir que les céréales BIO soient positionnées dans le rayon des céréales, que les biscuits BIO soient positionnés dans le rayon des biscuits, etc.

Pensez-vous que les réseaux spé pourraient utiliser des outils marketing ou services pour se démarquer de la bio en GD ? Si oui lesquels ?

CS : En effet, les réseaux spécialisés BIO ont encore une marge de progression pour se démarquer de la BIO en grande distribution. Cela se jouera sur l’assortiment de produits proposés mais aussi sur la démarche. Encore une fois, il faut aller plus loin que le BIO : proposer des produits plus naturels et plus sains, comme la démarche entreprise par Naturalia cette année avec un repositionnement centré autour du mieux manger.

Mais les enseignes spécialisées BIO doivent aussi s’inspirer des outils marketing de la grande distribution pour faire venir une clientèle plus large dans ses magasins.

Le bio étant le premier pas vers une alimentation plus durable, chaque acteur de la chaine a une responsabilité pour le rendre plus accessible. Cela passe-t-il par une sécurisation des relations commerciales en privilégiant la contractualisation de long terme ?

Certaines enseignes mettent en effet en place une contractualisation pluriannuelle avec les PME locales, même si les négociations commerciales restent présentes chaque année.

C’est notre cas avec l’une d’entre elle et cela permet de discuter plus posément pour construire l’avenir de la relation commerciale, plus sous la forme d’un partenariat qu’uniquement avec une visio fournisseur/distributeur.

Ce système mériterait d’être démocratisé pour les TPE / PME de la BIO, ou non BIO d’ailleurs, afin de solidifier le tissu économique de l’agroalimentaire national, sur tous les maillons de la chaine.